Mission accomplie!

jeudi 10 avril 2014

J'ai failli mettre "orgie" comme titre mais vous allez vous imaginer des choses! Orgie de lecture, bien évidemment ! De toute façon il va falloir vous y faire : quand je suis silencieuse par ici, c'est que je lis comme une timbrée. 

Mais surtout, grande nouvelle, j'ai lu tous les livres que j'avais à lire pour mon challenge trimestriel! J'ai parlé de To kill a mockingbird et Fifi Brindacier dans mon article précédent, je vais donc vous parler des trois autres!

La femme au miroir
Eric-Emmanuel Schmitt

Anne vit à Bruges au temps de la Renaissance, Hanna dans la Vienne impériale de Sigmund Freud, Anny à Hollywood de nos jours. Toutes les trois se sentent différentes de leurs contemporaines; refusant le rôle que leur imposent les hommes, elles cherchent à se rendre maîtresses de leur destins. Trois époques. Trois femmes: et si c'était la même ?

Schmitt est l'un des auteurs qui m'a intéressée à la littérature contemporaine il y a plusieurs années de cela. J'ai lu beaucoup de ses titres, qu'il s'agisse de nouvelles, de pièces de théâtre ou de romans. J'avais adoré La part de l'autre (un must-read s'il en est!) mais j'avais été un peu lassée de ses intrigues qui finissent bien, de ses personnages bienveillants et des bons sentiments sous-tendus derrière chaque trame.

Et puis j'ai dévoré La femme au miroir. Si au début j'ai eu du mal à comprendre où l'auteur voulait en venir, j'ai fini par être agréablement surprise par les allers-retours entre les trois époques, les parallélismes intelligents et bien menés, et les mêmes interrogations qui reviennent dans trois contextes on ne peut plus éloignés. Anne est une sorte de mystique qui ne rêve que de connexion avec la Nature et les forces qui nous animent, seulement son style de vie marginal inquiète son entourage et abreuve les mauvaises langues de suspicions et de méchancetés. Hanna, jeune mariée à un riche héritier de bonne famille viennoise, se sent à l'étroit dans le costume que les moeurs lui imposent, et ne comprend pas pourquoi elle n'arrive pas à se sentir heureuse et épanouie dans sa vie pourtant parfaite ; elle découvre alors la psychanalyse. Anny, enfin, est une starlette d'Hollywood qui, perdue, sans attaches et sans gardes-fou, s'essaie à tous les extrêmes pour jouer avec sa vie, la mettre en danger et fuir un monde d'artifices et de langues de vipère : c'est en cure de désintoxication qu'elle fait la rencontre d'un jeune infirmier qui ne la regarde pas comme une machine à fric.

Les trois femmes n'ont apparemment pas plus en commun que leur décalage par rapport à la société, et c'est exactement cela qui les rend si proches. Comment se réaliser, comment être soi-même et pas seulement le pâle reflet de ce que l'on attend de nous? Les questionnements apportés par la lecture sont multiples et tendent à une réflexion poussée non seulement sur la place de la femme, mais plus généralement sur l'accès au bonheur.

Et puis surtout, il y a le style. Raffiné, intelligent, rythmé, Schmitt réalise dans La femme au miroir ce qui m'avait tant manqué depuis La part de l'autre : un très bon roman avec des personnages forts, et un questionnement certes présent mais qui reste discret, ne se contentant que de nous murmurer des idées à l'oreille sans s'imposer. J'ai beaucoup aimé. Je conseille vivement!


L'extravagant voyage
du jeune et prodigieux T.S.Spivet
Reif Larsen

T.S. Spivet est un enfant prodige de douze ans, passionné par la cartographie et les illustrations scientifiques. Un jour, il reçoit un appel inattendu du musée Smithsonian lui annonçant qu'il a reçu le très prestigieux prix Baird et qu'il est invité à venir faire un discours. A l'insu de tous, il décide alors de traverser les États-Unis dans un train de marchandises pour rejoindre Washington DC... Mais là-bas personne ne se doute qu'il n'est qu'un enfant. Muni d'un télescope, de quatre compas et des Mémoires de son arrière-arrière-grand-mère, T.S. entreprend un voyage initiatique qui lui permettra peut-être enfin de comprendre comment marche le monde...

Ce premier roman de Reif Larsen est déroutant à plusieurs niveaux. Tout d'abord par son format : ce livre de poche carré est doté d'une large marge où annotations, cartes, schémas et morceaux de vie complètent le récit principal. Un peu étrange au début, mais très vite, on s'habitue à suivre les petites flèches qui nous indiquent quand stopper noter lecture pour passer un moment sur le côté de la page.

Ensuite, c'est T.S. lui-même qui tend à nous perdre parfois, parce qu'il ne raisonne pas forcément comme le commun des mortels. Le récit est la première personne. T.S. est un jeune garçon très intelligent, au comportement un peu décalé : il aime retranscrire le monde, ses petites beautés et ses grandes énigmes sur des cartes et des schémas (il étudie la façon dont sa soeur épluche le maïs ou l'angle que forme le bras et le corps de son père lorsqu'il boit du whisky). Le regard qu'il porte sur son univers est unique, et nous amène nous aussi à poser des yeux curieux sur le monde qui nous entoure.

Son périple à travers l'Amérique est avant tout un chemin vers le deuil de son jeune frère, grâce auquel T.S., seul face au reste du monde, devra trouver les armes pour l'affronter et y trouver sa place. C'est également un questionnement sur la raison d'être du travail scientifique : la science n'est-elle que le progrès pour le progrès, ou bien est-ce une forme d'art qui nous permet de nous emparer de notre environnement pour mieux pouvoir nous y fondre? Pourquoi de grands scientifiques abandonnent-ils des carrières brillantes pour se retirer dans un coin du monde et chercher un insecte légendaire...? T.S. trouvera les réponses à toutes ses interrogations à la fin du roman quand, en se réconciliant avec ses origines et en acceptant la mort de son frère, il décidera de son propre destin.

Une très jolie histoire, une étonnante curiosité, une aventure littéraire à vivre et à déguster. J'ai beaucoup apprécié la lecture, même si j'ai trouvé certains passages un peu longs et certaines réactions de T.S. surprenantes, mais il m'a fait penser à Calpurnia. A croire que les auteurs d'aujourd'hui ont deux conseils pour la jeunesse : lisez et découvrez.


En attendant New York
Mitali Perkins

Asha, Reet et leur mère doivent aller vivre à Calcutta dans la famille de leur père, parti chercher du travail à New York. Bientôt, elles le rejoindront, c'est sûr. Les mois passent, loin de Dehli, rien n'est pareil, les filles ne font plus ce qu'elles aiment. Le départ pour New York est sans cesse reculé. La charge est lourde pour l'oncle qui les héberge. Il faut marier Reet. Un vieil homme se présente. Asha est désespérée pour sa sœur, elle va chercher une solution, la moins pire...

J'ai dit à la libraire avec qui je travaille : "Conseille-moi un livre que toi, tu as aimé!", et elle m'a mis En attendant New York entre les mains. J'ai mis un peu de temps avant de m'y mettre, mais ce fut une belle découverte!

L'histoire se passe dans les années soixante-dix en Inde : alors que les révolutions étudiantes battent leur plein en Occident, Asha, jeune fille de quatorze ans, écrit frénétiquement dans son journal qu'elle ne supporte pas de ne pas pouvoir faire de sport en extérieur, de ne plus aller au lycée et de ne pas pouvoir faire ce qu'elle veut de sa vie depuis qu'elle a eu ses règles. Pourtant, sa famille, bien qu'ancrée dans certaines traditions, est peut-être l'une des plus modernes de l'époque : son père lui a appris à jouer au cricket, Asha et sa soeur ont étudié dans une très bonne école où elles ont appris à maîtriser parfaitement l'anglais, et la jeune fille nourrit le rêve de pouvoir devenir psychologue une fois qu'elle aura mis un orteil en Amérique.

Entre tradition et modernité, c'est toute la complexité d'une société en plein bouleversement que décrit Perkins dans son roman : trois générations cohabitent sous le même toit, nourrissant chacune des rêves et des espoirs différents, tiraillés entre leurs désirs et ce qu'ils ont le droit de faire. Le style est simple et clair, ce qui aide beaucoup à se plonger dans l'ambiance familiale et à comprendre les dilemmes qui animent tous les habitants de la maison.

Un excellent roman, encore une fois, sur la quête du bonheur et les sacrifices à faire pour y parvenir! Je conseille la lecture d'En attendant New York à tous!

Si ça vous intéresse, vous pouvez consulter la liste des livres que je veux lire avant le 30 juin ici! A très vite!

2 commentaires:

  1. En y repensant, il n'était pas mal ce roman de femmes aux destins en miroirs.

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  2. J'avais eu un sacré coup de cœur pour le Schmitt ! Tes deux autres lectures me tentent beaucoup aussi, dans des registres différents...

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